6 Juin - 19 Septembre 1997
DAVID MACH
The Last Details
galerie jerome de noirmont

Vue in situ Exposition David Mach – The Last Detail / 06 juin – 19 septembre 1997 / Galerie Jérôme de Noirmont.

communique de presse

     Si David Mach est devenu un artiste reconnu et célèbre, exposé dans les galeries et musées du monde entier, c´est grâce à ses sculptures monumentales, constructions éphémères réalisées à partir de quantités massives de surplus industriels ou de matériaux de récupération, qui dénoncent la surproduction et la surconsommation dans nos sociétés occidentales et attirent notre attention sur le gâchis et l´importance excessive accordée aux possessions matérielles. Affirmant la place de l´objet dans l´art, il dénonce ainsi le dilemne de la création artistique depuis Marcel Duchamp.

     La prééminence du contenu sur la forme est une question qui le préoccupe comme plusieurs autres sculpteurs anglais, d´expression artistique très différente, auquels il a été comparé dans les années 80 -Tony Cragg, Bill Woodrow...-, formant un groupe appelé "New British Sculpture", plus par défaut que par style.

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     Encore étudiant au Duncan Jordanstone College of Art de Dundee, David Mach commence à développer sa conception très originale de sculpture publique, monument temporaire à grande échelle, avec des oeuvres faites de matériaux de récupération et d´éléments naturels, comme Camperdown Park, réalisée en 1978, une installation de grande envergure constituée d´un tapis de feuilles mortes suspendu aux branches d´un arbre.

     Arrivé à Londres en 1979, où il suit les cours du Royal College of Art, il réalise ses premières pièces à partir de quantités massives d´objets de grande consommation, fabriqués en série, provenant de surplus ou de rebut. Désireux de rattacher son activité artistique aux expériences du grand public, et en particulier aux travaux en usine (dont il fait lui-même l´expérience de 1975 à 1982), il transforme livres, magazines, annuaires, bouteilles, pneus, etc., en images reconnaissables, voire identifiables, par des procédés simples comme l´empilement ou la superposition en couches. Sa première sculpture d´importance, intitulée Silver Cloud III (1981), une réplique de Rolls-Royce grandeur nature construite avec 15.000 livres, caractérise bien les oeuvres représentatives qu´il crée alors.
     Dans le même esprit, Polaris (1983), un sous-marin fait de pneus, présenté lors de l´exposition "British Sculpture 83" à la galerie Hayward à Londres organisée avec le soutien d´une entreprise de production d´armes nucléaires, matérialise les rapports difficiles qu´entretient David Mach avec les structures qui le soutiennent et les sociétés industrielles qui lui fournissent les matériaux dont il a besoin pour créer ses intallations.

Développée aussi au début des années 80, une série séparée d´oeuvres est réalisée à partir de bouteilles, thème récurrent dans l´oeuvre de l´artiste, qui a travaillé dans une usine de bouteilles pour financer ses études. Thinking of England (1983), faite de rangées de bouteilles remplies de teintures, figure l´image combinée du drapeau britannique et d´une femme allongée sur le dos, les jambes écartées.

     À partir de 1986, alors qu´il utilisait initialement ces matériaux industriels pour créer des oeuvres démonstratives et représentatives, David Mach évolue jusqu´à explorer et délivrer les "messages extraordinaires" que ces matériaux véhiculent intrinsèquement. Les qualités presque liquides du papier glacé des journaux, les publicités et les actualités traitées de manière aléatoire se muent en tourbillons, en vortex, charriant et engloutissant des objets aussi encombrants que des pianos, des canapés, des voitures et des camions -Fuel for the Fire (1986). "Je trouve que ces matériaux ont leur propre énergie, constituent leur propre flot".

    L´artiste utilise alors l´humour comme une arme redoutable : "mettre de l´humour dans l´art le rend probablement encore plus sérieux". Dans Temple at Tyre (1984), figurant un Parthénon fait de 8.000 pneus usagés et de piles de containers, il montrait déjà son goût de la parodie, en particulier de la grandeur et du monumental en architecture, arrière plan essentiel à l´ironie de ses gigantesques installations éphémères. Dans le même esprit, à la fin des années 80, il réalise des oeuvres où de grands objets, comme des voitures, des bus ou des troncs d´arbres, semblent tenus en l´air par de minuscules poupées, nounours ou jouets -If you go down to the woods today, exposé à la Fundació Joan Miró à Barcelone en juin 1987. En 1993, dans la série Trophy Room, exposée à Varsovie, il parodie des trophées d´animaux empaillés, où les animaux semblent en révolte contre le rôle qu´on leur donne.

 


UN DÉTAIL DE PLUS


    Parmi les oeuvres de David Mach exposées à la Galerie Jérôme de Noirmont du 6 Juin au 26 Juillet, seront présentés une quinzaine de masques humains ou animaliers (girafe, tigre, zèbre), faits de milliers d´allumettes adroitement collées les unes aux autres, consumées ou assemblées en patchworks de couleurs, se transformant parfois en cibles. Des bustes, un cadre monumental et une urne (2 mètres de haut) réalisés à partir de simples cintres en métal, suscitent une fois de plus le respect devant l´ingéniosité de la vision, l´incrédulité devant l´adresse de ce travail manuel et un sourire désabusé devant l´humour inhérent à ces pièces. Une installation composée de plusieurs centaines de magazines jaillira des fenêtres et déferlera à travers la galerie du premier étage. Des dessins et collages de différents projets monumentaux complèteront l´exposition.

    Tous les matériaux utilisés dans cette exposition sont très ordinaires, communs, des objets à l´abandon qui apparaissent dans notre vie quotidienne et dont nous nous débarrassons sans même y jeter un dernier coup d´oeil. Pourtant, ce sont des matériaux importants, un dénominateur commun accessible à l´homme riche et à l´homme pauvre, à l´homme fort et à l´homme faible. Ils sont représentatifs d´une échelle humaine, du fait d´être simplement un être humain sur cette planète.

    Ce sont des objets hautement symboliques qui engagent nos actes intimes, nos actes subconscients. Les cintres, par exemple, peuvent nous "rencontrer" à la fin de chaque journée. Dans un sens, chacun se suspend lui-même sur le cintre, se débarrassant de toute formalité, réduisant ses responsabilités, peut-être même se débarrassant complètement de toutes ses responsabilités.

    Nous transportons même partout avec nous journaux, magazines et allumettes, ils nous représentent, ils annoncent notre individualité et notre habilité à survivre.

    Toutes les sculptures de l´exposition The Last Detail sont certes petites, mais excessives et extravagantes. David Mach se révèle dans cette extravagance, il veut que chaque sculpture soit une épopée digne de Cecil B. De Mille ; en utilisant chaque matériau littéralement des milliers de fois, il veut forcer ou tout du moins encourager le spectateur à y porter un autre regard.